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Le bruant ortolan : un oiseau migrateur en sursis

Sciences participatives

Voilà un oiseau des prairies, landes et clairières qui fait régulièrement l'actualité au mois d'août. C'est en effet lors de cette période estivale que s'ouvre la chasse au bruant ortolan dans les régions du Sud-Ouest de la France, un des lieux de passage du migrateur, avant de filer vers l'Afrique.

Doit-on encore chasser un oiseau en voie d'extinction ?

Or cette chasse s'effectue sans cadre légal par la France. Elle est interdite par l'Union européenne, l'oiseau étant en danger d'extinction en métropole. La raison évoquée pour continuer de chasser l'espèce par les fédérations de chasseurs est que la majorité des oiseaux tués proviennent de Russie, un pays où les effectifs sont importants.

L'oiseau, au rapport

Alors qu'il est en ce moment en train de séjourner sur les terres africaines, notre oiseau convoité fait la Une d'une vaste étude réalisée par le Muséum national d'Histoire naturelle et financée en partie par les fédérations de chasseurs des Landes.

Bruant ortolan © Sérgio David Silva | Flickr

Quelles sont ses routes de migration ?

Cinq ans ont été nécessaires pour enfin déterminer ses routes de migration à travers l'Europe. Avec une question sous-jacente : les bruants ortolans traversant le Sud-Ouest proviennent-ils vraiment de Russie ?

30 ans de disparition

Parce qu'il y a tout de même urgence. En France, sa population nicheuse accuse depuis 2001, une baisse de 57 % des effectifs (résultat du Suivi Temporel des Oiseaux Communs (STOC) ici). Et en Europe, de 88 % depuis les années 1980 (European bird census council là). En trente ans, cela fait beaucoup d'oiseaux disparus.... 

A gauche : mâle avec un photomètre sur son dos © Frédéric Jiguet / A droite : le même mâle recapturé pour récupérer le photomètre © Julien Laignel | MNHN

Une bague à la patte

Avec la coopération de très nombreux pays européens, les chercheurs ont équipé les oiseaux capturés - sur leurs zones de reproduction ou au cours de la migration - de dispositifs permettant de les géolocaliser. Des plumes ont aussi été prélevées afin d'étudier leur origine génétique et de déterminer le lieu où l'oiseau les a produites.

Les oiseaux russes ne passent pas par la France

Les résultats sont très clairs : tous les oiseaux venant de Russie migrent vers les hauts plateaux éthiopiens. La France ne compte donc aucun ortolan nichant en Russie. En ne considérant que les pays les plus nordiques, les ortolans migrant par la France proviennent surtout de Pologne et de Finlande, mais aussi d'Allemagne, de Suède, de Norvège, et des pays baltes.

Trajets annuels de bruants ortolan obtenus avec des photomètres anglais et suisses

Deux routes pour les nordiques

Ceux de Finlande et de l'est de la Pologne longent les côtes méditerranéennes pour atteindre l'Espagne. Quant à la majorité des Suédois, Allemands et ceux de l'Ouest de la Pologne, ils entrent en France par l’Est et le Nord, pour rejoindre le Sud-Ouest. 

En chiffres

Maintenant combien d'oiseaux tracent-ils leur route dans le ciel landais ? Je ne rentrerai pas dans les détails des calculs que vous pouvez lire dans le rapport ici mais le chiffre le plus vraisemblable est de 81 000 couples (entre 46 000 et 116 000 couples). Un chiffre clé pour déterminer le nombre d'oiseaux autorisés à être tués par la chasse dans les Landes. Le taux de prélèvement concédé par la directive européenne doit correspondre à 1 % de la mortalité naturelle annuelle de l'espèce. Avec 81 000 couples, cela correspond à environ 1000 oiseaux par an. Mais en sachant que depuis les années 2000, 3 000 oiseaux disparaissent de ses populations nicheuses, n'est-il pas temps de laisser un peu tranquille ces grands migrateurs ?

Bruant ortolan © Joost Woltering | Flickr

La génétique s'en mêle

Pour la chercheuse Caroline Moussy qui réalise les études génétiques, il y a un autre problème très important qui s'ajoute à la disparition des habitats et de la chasse : l'isolement génétique de la population scandinave. « En ne se mélangeant plus aux autres populations, elle augure d’une diminution de la diversité génétique, qui agit sur les capacités d’adaptation aux changements des oiseaux. Mais on n'en est pas encore là ! Pour le moment, c’est un souci, parce qu'il n’y a quasi plus d’immigration qui pourrait contrer les déclins régionaux. ».

Alors quel avenir pour le bruant ortolan ?

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Lisa Garnier, le lundi 23 janvier 2017

Contact : lisa.garnier@mnhn.fr

 !! SAVE THE DATE !!! 

Le grand comptage hivernal de Oiseaux des Jardins, c'est le week-end prochain les 28 et 29 janvier 2017. Ici toutes les informations.

MERCI !

à Luis Sitges pour sa photographie d'ouverture ! Son site est à découvrir là.

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