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moineau mâle@Jean-Jacques Boujotflickr.jpg

Nids douillets ou nids toxiques ? Les moineaux subissent aussi la pollution des villes

Sciences participatives

Quand le soleil brille de ses feux printaniers, il est difficile d'admettre que l'air frais, presque doux comporte son lot d'invisibles particules fines néfastes. Cet hiver, la France a connu plusieurs pics de pollution (voir ici) et les villes sont généralement les plus touchées. 

Intoxication par la ville

Ces pics de pollution et la pollution en général, accompagnés de décibels à trop haute dose, ne sont pas sans conséquences sur le cerveau des humains et sur la croissance des fœtus et des enfants (ici un article trouvé sur un blog avec de nombreuses références scientifiques datant de 2015).

Les envolés des nids

Chez les moineaux domestiques, dont les effectifs ont drastiquement chuté en Europe depuis les années 1980 (- 64%) mais qui se stabilisent depuis les années 1995, des chercheurs français ont, pour la première fois, montré que la ville agit aussi sur la morphologie des petits « jeunes », les envolés des nids.

Changement en pourcentage de la valeur de l'index calculé entre la première et la dernière année de suivi (1980-2014) © EBCC_RSPB_BirdLife_Statistics Netherlands

Des moineaux une bague à la patte

On n'en est pas encore à l'étude du développement de leur cerveau mais grâce au réseau des bagueurs bénévoles (lire Des oiseaux dans les mains) du Centre de Recherches sur la Biologie des Populations d'Oiseaux (CRBPO), près de 600 moineaux domestiques adultes et juvéniles ont été pesés, mesurés et bagués sur 30 sites répartis en France métropolitaine.

Femelle moineau domestique © Ovo | Flickr

Des envolés mal emplumés

Et les résultats sont là : plume moins dense, faible prise de poids et tarses plus courts sont les caractéristiques communes des jeunes moineaux élevés en ville. La diminution de la taille du tarse a également été trouvée dans des populations urbaines de l'Est de l'Europe.

La pénurie des insectes

La ville serait le royaume de la malbouffe. Notamment parce que nos pratiques jardinières urbaines ne favorisent pas les plantes hôtes des rondouillardes chenilles. Cela aurait des conséquences sur la croissance des oisillons, leurs parents ne trouvant pas assez d’insectes riches en protéines pour les nourrir. La pollution chimique urbaine serait une autre cause de la raréfaction des insectes en ville. Il faut noter qu'à l’âge adulte, les moineaux des villes restent plus petits que les moineaux des champs. En revanche, leur plumage est de même qualité en ville et à la campagne, indiquant que la pénurie en insectes impacterait surtout les jeunes, et pas trop les adultes (un autre article scientifique ici).

Du bruit

Les chercheurs supposent aussi que le bruit des villes affecte la croissance des poussins dans leurs nids (lire ). Des oisillons de moineaux exposés expérimentalement à du bruit urbain grandissent aussi vite et survivent aussi bien que ceux restés au calme de la campagne. Mais il semble que leur organisme ‘vieilli’ prématurément (lire ici). Les mères de ces oisillons exposés au bruit sont également perturbées, s’envolant plus rapidement en cas de dérangement.

Moineaux domestiques © Ingmar Gerkens

Des nids en mégots de cigarette

Enfin, c'est là que je sors de mon chapeau une étude de chercheurs mexicains qui montrent que de nombreux nids douillets sont construits à l’aide des fibres trouvées dans les filtres de cigarettes jonchant les trottoirs. Or ces fibres sont loin d'être pauvres en produits chimiques. Outre la nicotine, elles contiennent des insecticides, du cyanure, des métaux lourds, du propylène glycol... Des produits qui bénéficiraient à court terme aux nids douillets des poussins !  

Des techniques pour éloigner les parasites

Les oiseaux pratiquent en effet leur propre médecine. Au nid, les parasites sont un fléau et pour lutter contre, les oiseaux arborent des techniques : chez les mésanges bleues, on s’arrange avec des herbes aromatiques, notamment la lavande (l'article scientifique est ici). Chez les merles, c'est avec de la marrube, du lamier, de l'anacycle tomenteux ().  

© David Jenkins | Flickr

Des produits mutagènes

Mais chez les moineaux des villes (au moins au Mexique), on utilise le filtre à cigarette ! Et ça marche pour repousser les parasites des oisillons ! En revanche, ce sont les parents qui trinquent ! Leurs globules rouges présentent de nombreuses anomalies lorsque la quantité de fibres de cigarettes augmente dans les nids.....

Allez profitez de la douceur printanière quand même, ça fait du bien !

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Lisa Garnier, le lundi 27 février 2017

Contact : lisa.garnier@mnhn.fr

--> Vous voulez devenir un bagueur d'oiseaux ? Les renseignements sont là.

--> Le blog du CRBPO est à découvrir ici

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