Ce joli papillon orangé de début de printemps est l’un des plus communs et des plus précoces en France. Mais saviez-vous que son nom faisait référence à un animal marin, qu’il était associé aux orties ou qu’il draguait en jouant de la musique ?
1 - Son nom fait référence à une tortue marine…
Lorsqu’on voit ce beau papillon orangé, couvert de taches noires, blanches et jaunes au-dessus, on se demande bien d’où il peut tirer son nom, petite tortue… Le savant Réaumur nous éclaire en 1734 : "il est l'un de ceux à qui on a donné le nom de tortüe, à cause de la distribution de ses couleurs, qui imite en quelque sorte celles des taches de l'écaille" (1). Or à l’époque les écailles qu’il mentionne désignent un matériau de luxe conçu à partir d’écailles… d’une tortue marine, la tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata) Si ce nom s’est aujourd’hui imposé, certains lui préfèrent « Vanesse de l’ortie », en référence à sa plante hôte, ou encore « Petit renard », eu égard à la couleur de ses ailes. Et pourquoi « Petite » ? Tout simplement pour la différencier de la Grande tortue, légèrement plus imposante et aux couleurs moins vives.
2 - Elle vole jusqu’aux sommets de l’Himalaya
Notez le duvet qui couvre son abdomen : la petite tortue aurait presque des allures de yéti. Et pour cause : cette espèce a gardé certaines caractéristiques acquises lors de la dernière glaciation. A la fin de cette période, le papillon émigra, soit en latitude vers le Nord, soit en altitude. L’espèce actuelle, si elle s’est adaptée à tous les climats, fait toujours preuve d’une grande résistance au froid. Elle peut survivre à de très basses température, jusqu’à -24 degrés. On peut ainsi observer la petite tortue jusqu’à 3400 mètres d’altitude en Europe, et peut se reproduire jusqu’à 2600 mètres. On a même aperçu ses petites ailes oranges à travers les sommets de l'Himalaya, à plus de 5000 mètres !
3 - Les adultes hivernent dans les habitations
Cette résistance au froid explique sa capacité à hiverner au stade adulte, que ce soit dans les anfractuosités des arbres morts, dans les rochers, mais aussi dans les bâtiments ou les bords de fenêtres. Fixée en position de repos, les ailes repliées, la petite tortue rentre dans un état de léthargie qu’elle ne quittera qu’aux beaux jours. Une période de grande vulnérabilité : certaines seront mangées par les araignées, d’autres pourront se réveiller subitement dans les maisons chauffées pour les vacances de Noël, et bruler leurs réserves en voletant contre les fenêtres, alors que l’hiver est loin d’être fini. L’arrivée des premières journées ensoleillées au mois de mars sonne le réveil. Les papillons déploient alors leurs ailes et prennent leur envol pour se reproduire. La Petite tortue produit une, deux ou trois générations annuelles en fonction des régions. La dernière hivernera à son tour.
4 - Pour séduire la femelle, le mâle joue de la musique avec ses antennes
A l’approche de l’accouplement, le mâle rôde autour des orties à l’affût d’une femelle. Une fois la rencontre faite, il entame une fascinante parade : il se place derrière sa moitié et se met à lui tapoter les ailes postérieures avec ses antennes. Il est même possible, paraît-il, d’entendre à l’oreille cette petite musique nuptiale. Le processus se poursuit en plein vol, et peut durer plusieurs heures ! Si la femelle est réceptive, l’accouplement se produit enfin, juste avant la tombée de la nuit.
5 - Elle pond sur les feuilles d’orties
Les femelles vont pondre des amas de près d’une centaine d’œufs sur les feuilles d’orties, en particulier l’ortie dioïque (grande ortie). 10 jours plus tard, les chenilles apparaissent. Elles sont presque noires, munies d’excroissances qui évoquent des épines. Grégaires, elles vont vite se rassembler en un groupe dense, avant de tisser une toile pour se protéger des prédateurs. C’est dans ce nid de soie qu’elles passeront les quatre premiers stades de leur développement avant de se séparer pour la nymphose.
(1) https://www.lavieb-aile.com/article-zoonymie-du-papillon-la-petite-tortue-aglais-urticae-124475615.html