Back to top
bandeau.jpg

Dernières nouvelles de la biodiversité en ville

Sciences participatives

L’époque des soutenances est proche pour de nombreux stagiaires du CESCO ! Ils commencent à exposer leurs travaux en interne pour s’y préparer. Dans cet article, découvrez des sujets et résultats de stages concernant la biodiversité en ville.

Le CESCO quesako ?
Le CESCO, Centre d’Ecologie et des Sciences de la Conservation, est un laboratoire de recherche rassemblant plus d’une centaine de personnes autour d’un même enjeu : l’étude des systèmes écologiques et de leurs transformations, notamment par les activités humaines. Cette unité de recherche est celle dans laquelle le programme Vigie-Nature s’est développé à partir de 2006, avec la création d’observatoires de sciences participatives s’ajoutant au tout premier du genre, le STOC, ouvert il y a 35 ans.
Parmi les grandes thématiques du laboratoire, il y a celle de la biodiversité en ville. Les enjeux rassemblant les membres du groupe de travail "Biodiversité en ville" sont l’évaluation de l’état de la biodiversité, sa perception par les différentes parties prenantes, l’étude des propriétés de ces écosystèmes et les services qu’ils rendent, l’intégration de la biodiversité aux espaces bâtis, la protection et la restauration des habitats, et l’évaluation des outils mis en œuvre pour la sensibilisation et l’éducation.
Des stagiaires venus de divers horizons contribuent à ces recherches, et à l’occasion de la dernière réunion du groupe de travail, nous avons écouté les répétitions de leurs soutenances. Des plantes aux animaux, en passant par les regards des urbain.es, les sujets invitent à une promenade citadine.

GT Biodiv en ville - juin 24.jpg

séance de juin pour le groupe de travail "Biodiversité en ville" - crédit photo : Nathalie Machon

Commençons la promenade au pied d'un arbre, planté sur le trottoir. Ce pied héberge des plantes qui ont poussé spontanément, qu’on appelle également adventices, du verbe latin advenire « qui vient de l’extérieur ». Ces plantes ni attendues ni plantées, représentent une grande partie de la biodiversité urbaine. En quelques semaines, des stagiaires ont inventorié la flore de quelques… 1 300 pieds d’arbres ! Certains d'entre eux sont très riches, fourni en flore de diverses espèces et d’autres sont presque vides. Pourquoi ? Quelles plantes s’y installent et comment ? De précédentes études apportent quelques pierres à l’édifice mais une grande partie du mystère demeure quant à l’usage des pieds d’arbres par les plantes. On en sait un peu plus aujourd'hui...

Rendons-nous dans le 12ème arrondissement de Paris, avec Constance Monnier dont le stage de master 2 en écologie est centré sur l’origine de l’assemblage des espèces végétales (ou communautés) aux pieds des arbres. Ces communautés se constituent-elles au fil du temps au gré des arrivées de nouvelles graines ? Ou sont-elles déterminées par les conditions environnementales avant tout ?
Dans ce quartier de Paris, 128 espèces ont été trouvées. La diversité des espèces floristiques dépend des rues, et au pied d’un arbre, on trouve entre 1 et 19 espèces. Ce chiffre varie selon le dispositif : en moyenne plus élevé lorsque le sol est nu, il est moindre dans le cas où le sol est stabilisé, puis lorsqu’il y a une grille ajourée. Les pieds d’arbres équipés de grille pleine comportent le moins d’espèces. L’essence de l’arbre joue aussi sur la diversité à ses pieds. La palme revient aux platanes, aux pieds desquels la richesse floristique est la plus importante. Les arbres dont les pieds sont les plus dénudés, comme le laurier du Portugal, produisent des substances inhibant la croissance des autres plantes (allélopathie). D’autres facteurs influencent la richesse spécifique : la proximité des gares, l’orientation des rues, la présence d’excréments, le diamètre des troncs. La compaction du sol, le piétinement, la pollution et les interventions techniques ont des effets négatifs sur la richesse spécifique. Toutes ces variations environnementales expliquent les différences de diversité aux pieds des arbres. Mais au fil du temps, les communautés à l’échelle des rues sont stables indépendamment des conditions environnementales. Il y a peu d’échanges d’espèces entre elles. Aussi, l’assemblage des communautés serait d'abord déterminé par des facteurs historiques de colonisation.

Pour son master 1 d’écologie, Clément Maouche s’est particulièrement investi dans le recensement des espèces sur les 1300 pieds d’arbres. Observant sur le terrain que les rues avec une grande diversité d’espèces sont aussi celles qui sont les plus lumineuses, il s’est demandé si la largeur des rues a une incidence sur la diversité des espèces observées aux pieds des arbres. L’analyse statistique à partir des relevés de terrain montre qu’il y a bien une corrélation positive entre largeur des rues et richesse spécifique, lorsque l’on considère les pieds d’arbre aménagés avec une grille ajourée : cette dernière protégerait les plantes du piétinement. Il y a également une corrélation entre la largeur des rues et les préférences thermiques des plantes tout comme leurs besoins en lumière. Pour autant, les corrélations n’indiquent pas une relation de cause à effet : pour en avoir le cœur net, il faudrait mettre en place un protocole expérimental.

Élargissons maintenant notre regard en considérant d’autres habitats utilisés par les plantes... Des murs aux pelouses, en passant par les haies et les plates-bandes, de nombreux aménagements prévus ou providentiels sont investis par les plantes.
Et plaçons-nous à l’échelle du territoire, avec Marie-Agathe qui a utilisé les données récoltées en 2023 par les participant.es de Sauvages de ma rue afin de conduire des analyses sur ces environnements urbains avec une question : comment structurent-ils la végétation urbaine ? Ses résultats indiquent qu'il existe des similarités entre les compositions en espèces que l'on trouve sur les murs et dans les fissures, entre celles des pieds d’arbres et des haies, et enfin entre celles des pelouses, des chemins et des plates-bandes. Mais attention, lorsque l’on tient compte de l’abondance relative de chaque espèce, la végétation est bel et bien différente d’un milieu à l’autre. Par exemple, si la composition en espèces est assez similaire entre les pelouses, chemins et plates-bandes, la végétation n’est pour autant pas équivalente entre ces milieux parce que certaines espèces vont être plus ou moins représentées dans les milieux.
Par ailleurs, Marie-Agathe a travaillé sur les outils de Sauvages de ma rue. En observant les fréquences d’occurrences des espèces, soit combien de fois des espèces étaient mentionnées par les participants, elle a travaillé sur l’ajout de certaines dans la clé de détermination en ligne de SDMR. Bonne nouvelle ! Bientôt, la clé sera enrichie et permettra de déterminer plus facilement des représentantes de la famille des poacées (graminées).

Alors que la propreté des villes est une problématique au goût du jour dans de nombreuses villes, la ville de Paris s’est dotée d’une application (Dans ma rue) permettant à qui le veut de signaler tout ce qui pourrait constituer une anomalie sur la voie publique, en prenant le sujet en photo. Poubelle débordante, graffitis, déchets sauvages apparaissent dans les signalements… Et parmi cela, des plantes.

Loïc Antoine, en master Bioterre, a constitué un échantillon à partir des photos de plantes signalées comme problématiques. Qu’est-ce qui pousse les utilisateurs de l’application à signaler le vivant comme une anomalie en ville ? Est-ce que certaines espèces sont plus signalées que d’autres ? La concurrence entre végétation adventice et horticole peut-elle être en jeu ? De l’analyse des photos, il détecte que les plantes signalées sont le plus souvent celles qui « débordent » du mobilier urbain (pots, pieds d’arbres…). En regardant les espèces signalées, il s’aperçoit que ce sont surtout des poacées, en particulier l’orge des rats. Quelques autres espèces signalées ont en commun un port important, comme la pariétaire de judée : prenant ostensiblement de la place sur le bitume, celles-ci seraient donc plus remarquées que d’autres espèces plus discrètes.

En master d’urbanisme, Judith Vieillefond a poursuivi des travaux déjà entamés sur les motivations des signaleurs. Elle s’est concentrée sur les publications du compte Tweeter de l’application Dans ma rue et du compte Paris j’écoute. Elle a aussi rencontré des signaleurs pour faire des promenades « commentées ». Finalement, ses constats prolongent les résultats précédents : ce sont les rats et les pigeons qui sont le plus souvent signalés comme problématiques, devant les plantes, les espaces verts et le mobilier urbain comportant de la végétation. Les signaleurs conçoivent leur démarche comme un véritable service rendu à la ville. Le compte Tweeter apparait comme relai de l’application pour insister sur certains points que les usagers considèrent comme n’étant pas suffisamment pris en compte.

Ainsi les rats et les pigeons n’auraient pas leur place en ville. Qu’en est-t-il des autres animaux ?

Line Rondard est en master Transformations et Transitions Socio-écologiques. Sa thématique ? Les imaginaires de l’animal en ville sur le Territoire PEMB (Paris Est Marnes et Bois). Son travail rentre dans le cadre de l’élaboration d’un guide pour une ville perméable au vivant, qui demande de repenser nos manières de cohabiter avec les autres espèces en ville. Plus de 400 personnes du territoire ont répondu au questionnaire qu’elle a conçu. Il en émerge 4 postures révélant différents rapports au monde : « les animaux doivent être présents en ville » comme une évidence, « l’animal en ville doit être géré et maitrisé » avec une place circonscrite et des espaces dédiés, « l’animal est un partenaire en ville, on doit en prendre soin » car il entre dans la sociabilité, et « la ville n’est pas accueillante pour les animaux » où l'on est coincé, étriqué. Les réponses indiquent également une séparation franche entre l’animal de compagnie et l’animal sauvage : par exemple, une même personne peut considérer que les animaux de compagnie créent des contraintes et des nuisances mais qu’observer les animaux sauvages est une activité qui ressource. Le sujet divise... Reste à trouver des manières de coexister ensemble !

HD.

Vous aimerez aussi

Sciences participatives
Camille_Tourtelier.jpg
11 Décembre 2024

Habiter en oiseau à Paris, la première thèse Birdlab

Sciences participatives
rencontres VF 24 - groupe.jpg
28 Novembre 2024

« Sans vous, rien de tout ça ne serait possible »

Sciences participatives
Concarneau-protocole ALAMER.jpg
21 Novembre 2024

Le succès de l’algue saucisson

Sciences participatives
658147-pxhere.com.jpg
14 Novembre 2024

Les communautés d'oiseaux face au changement climatique

Fond de carte