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La nuit, quand les voies sont libres

Sciences participatives

Avec l'ouverture de l'exposition « Nuit » à la Grande Galerie de l'Evolution du Muséum national d'Histoire naturelle le 12 février dernier, mon sujet pour ce lundi matin était tout trouvé ! Qui mieux que la chauve-souris représente l'univers sombre et ténébreux de la face cachée du soleil ?

L'info qui tombe à pic !

Christian Kerbiriou, responsable du programme Vigie-Chiro m'a annoncé une excellente nouvelle : son équipe (Jean-Christophe Vandevelde, Alice Bouhours, Jean-François Julien, Denis Couvet) voit une publication scientifique issue du suivi temporel des chauves-souris acceptée pour publication dans la revue Ecological Engineering. Hommage à l'engagement des participants à ce programme ! C'est grâce à eux que les données existent.

Des locomotives d'un nouveau genre

Alors qu'ont-ils découverts, ces chercheurs ? Qu'à la nuit tombée, alors que les trains n'arpentent plus les aiguillages, les reines volantes de la nuit tirent activement profit des voies ferrées pour y chasser les insectes. Et n'allez pas croire que c'est anecdotique. La Pipistrelle commune y est particulièrement active, bien plus que dans d'autres habitats tels que les champs de grande culture. Mazette ! Les voies ferrées seraient plus bénéfiques à la pipistrelle que notre agriculture intensive.

Le long des rails

Ces infrastructures linéaires de transport, comme on les appelle dans les sphères de la recherche et des ministères, sont pourtant plutôt connues pour leur rôle de « barrage » des déplacements d'espèces ou encore « d'autoroutes » pour celles dont on ne veut pas, les exotiques envahissantes. Cependant, si vous vous souvenez de l'article Des sauterelles au micro des chercheurs, toutes les voies ferrées ne se valent pas. Certaines se font plus accueillantes que d'autres pour les orthoptères, et ce, en fonction de l'environnement des voies.

La question

Pouvait-on trouver le même genre de résultats avec les chauves-souris ? Est-ce que leur activité est identique le long des accotements des voies ferrées selon qu'elles traversent les forêts, les champs intensément cultivés, les prairies ou les zones de bâtis? A toute question, un protocole expérimental pour la tester. Notre équipe s'est donc intéressée à deux voies ferrées récentes de l'est et du sud-est de la région Île-de-France où circulent en journée des trains à grande vitesse mais où la nuit tout le monde dort. Sauf, évidemment, les noctambules !

Vigie-Chiro

Le protocole Vigie-Chiro a été déployé le long de ces voies. 89 points d'écoute ont été réalisés et 33 986 cris ont pu être enregistrés. Plus de 80% de ces cris ont été émis par la pipistrelle, près de 7% par la Noctule de Leisler, près de 3% par la Noctule commune, 2,5 % par le Murin de Natterer, enfin les cris provenaient également de la Pipistrelle de Kuhl, du Murin à moustaches, la Sérotine commune, le Murin de Daubenton et des oreillards. Afin de pouvoir comparer l'activité des chauves-souris le long des deux voies de chemin de fer en fonction des milieux traversés avec celles de la France entière, les chercheurs ont également étudié les données récoltées de 2006 à 2011 par les observateurs répartis sur le territoire national. Soit 485 lieux d'écoute et 524 000 cris de chauves-souris ! Ces données nationales leur ont permis de connaître les espèces en moyenne les plus fréquentes dans les différents habitats : forêts de feuillus et de conifères, prairies, surfaces artificielles, etc.

La Pipistrelle commune

Après comparaisons et tests statistiques, l'activité des murins s'est vue plus réduite le long des voies ferrées que le long des forêts. En revanche, la Pipistrelle commune s'est montrée très consommatrice des espaces ferrés. Il n'y a que le long des cours d'eau et des étendues aquatiques que son activité est plus forte ! Comme quoi l'espèce est maître dans l'utilisation des tracés plus ou moins linéaires et homogènes qu'ils soient terrestres ou aquatiques.

Le rôle des trains

Christian Kerbiriou et Jean-François Julien tempèrent cependant les résultats puisqu'à Paris, les effectifs de la Pipistrelle commune ont bondi sur la petite ceinture après l'arrêt du trafic en 1993. Donc oui, la pipistrelle apprécie les infrastructures ferroviaires mais il faut quand même étudier comment les trains affectent leurs chasses nocturnes, leurs dortoirs le jour, etc.

La petite ceinture de Paris ©Jef Poskanzer | Wikimedia Commons

L'article en anglais est à découvrir ici. Il ne vous reste plus qu'à venir faire un tour au Muséum pour l'expo  Nuit !

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Lisa Garnier, le lundi 17 février 2014

Pour s’abonner au blog, cliquer sur lgarnier@mnhn.fr

 

→ Les rencontres nationales Chauves-Souris de Bourges auront lieu les 14, 15 et 16 mars 2014. 370 participants venus de toute la francophonie européenne sont attendus. Toute l'équipe de Vigie-Chiro sera présente ! Plus d'info ici

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